Vertus et règles
Les vertus et les règles sont l’honneur, la loyauté, le courage (l’esprit d’endurance), la sincérité, la bonté, le respect et la politesse.
Le Dojo kun énonce cinq principes philosophiques qui guident l’entraînement dans le dojo. Ceux-ci sont la perfection du caractère, la loyauté, l’effort pour exceller, le respect d’autrui et l’absence de comportement violent. Ces principes sont nommés les Cinq maximes du karaté.
Le Dojo kun est généralement affiché sur un mur du dojo. Dans certains clubs, on le récite au début ou à la fin de chaque cours afin de motiver les karatékas et de les préparer à des entraînements ultérieurs.
Les 20 préceptes du karaté-do
N'oubliez pas que le karaté commence et s'achève par le rei. Rei signifie « respect, courtoisie, le salut », mais ne
pas le limiter à ces simples définitions. Il signifie le respect que l'on éprouve à l'endroit des autres, le rei est également la marque de l'estime que l'on a pour soi. Lorsqu'on transfère cette estime que l'on a pour soi sur les autres — respect — on agit conformément aux principes du rei. Les disciplines de combat qui font fi des principes du rei ne sont que pure violence, la force physique dénuée de rei n'est rien d'autre que brutalité, sans valeur pour l'être humain. Le rei est la manifestation physique d'un cœur sincère, révérencieux et empli de respect.
Il n'y a pas d'attaque dans le karaté. Dans le karaté, les mains et pieds sont potentiellement aussi mortels que la
lame d'un sabre : c'est pourquoi dans la mesure du possible vous devez éviter de décocher un coup mortel.
« Jamais il ne faut tirer son sabre sur un coup de tête », cet enseignement fondamental était au cœur du bushido
japonais. Ainsi, « il n'y a pas d'attaque dans le karaté » est une extension de ce principe de base selon lequel il ne
faut pas sortir son arme au moindre prétexte. Elle souligne la nécessité absolue de faire montre de patience et de
pondération. Mais quand la confrontation est inévitable, le pratiquant doit se lancer corps et âme dans le combat.
Le karaté est au service de l'équité. L'équité est ce qui sert le bien, la vertu. « Quand je m'observe et que je constate
que je suis dans le vrai, alors, mes ennemis, fussent-ils un millier ou dix mille, ne peuvent m'arrêter . Cela implique
bien sur qu'il faut faire preuve d'intelligence, de discernement et de force véritable ».
Apprends déjà à te connaître, puis connais les autres. À force de pratique, le karatéka connaît ses techniques
favorites ainsi que ses propres faiblesses ; en combat, il doit connaître ses propres points forts mais aussi ceux de
son adversaire.
Le mental prime sur la technique. Voila une anecdote qui illustrera cet aphorisme : « Un jour, un célèbre maître de
sabre, Tsukahara Bokuden, voulut mettre ses fils à l'épreuve. Pour commencer, il fit appeler Hikoshiro, l'aîné des
trois. En ouvrant la porte du coude, celui-ci la trouva plus lourde qu'à l'accoutumée et, en passant la main sur la
tranche supérieure de la porte, constata qu'on avait disposé, en équilibre, un lourd appui-tête en bois. Il l'enleva,
entra puis le remit exactement comme il l'avait trouvé. Bokuden fit alors venir son fils cadet, Hikogoro. Quand celui-ci
poussa la porte, l'appui-tête tomba mais il le rattrapa en vol et le remit à sa place. Bokuden fit enfin appeler
Hikoroku, son benjamin, le meilleur, et de loin, au maniement du sabre. Le jeune homme poussa puissamment la
porte et l'appui-tête tomba, heurtant son chignon. En un éclair, il dégaina le sabre court qu'il portait à la ceinture et
trancha l'objet avant qu'il ne touchât le tatami. À ses trois fils, Bokuden déclara : « C'est toi, Hikoshiro, qui
transmettras notre méthode de maniement du sabre. Toi, Hikogoro, en t'entraînant ardemment, peut-être égalerasPhilosophie
Tora no maki : symbole du karaté
Shōtōkan
Cérémonial
Vertus et règles
Les 20 préceptes du karaté-do
tu, un jour, ton frère. Quant à toi, Hikoroku, tu conduiras certainement un jour notre école à sa perte et attireras
l'opprobre sur ton patronyme. Je ne peux pas donc m'offrir le luxe de garder un individu aussi imprudent dans mes
rangs ». Sur ces vertes paroles, il le désavoua. Cela illustre parfaitement l'importance accrue des facultés mentales
sur les facultés techniques.
L'esprit doit être libre. Meng Tsu évoque la quête de l'esprit « perdu » pour mettre un terme à l'errance spirituelle.
Lorsque notre chien, notre chat ou nos poules se perdent, nous remuons ciel et terre pour les retrouver et les
ramener à la maison, mais il déplore que lorsque notre esprit (qui dirige notre corps) s'égare pour finir par se perdre
totalement, nous n'essayons même pas de le remettre sur le droit chemin. À l'inverse, Shao Yung soutient que
l'esprit a besoin de se perdre, si l'on attache l'esprit tel un chat en laisse, il perdra sa liberté de mouvement. Utilisez
l'esprit à bon escient, laissez-le explorer à sa guise, ne le laissez pas s'attacher ou s'enfermer dans un carcan. Les
néophytes exercent souvent un contrôle trop pesant sur leur mental, ils craignent de s'ouvrir au monde et de laisser
leur esprit courir librement. Au cours de l'apprentissage, il est préférable de suivre les consignes édictées par Meng
Tzu dans un premier temps, pour, dans un second temps, libérer l'esprit préconisé par Shao Yung.
Calamité est fille de non-vigilance. Combien d'accidents sont imputables à la négligence, à l'étourderie, le moindre
relâchement de l'attention peut réduire à néant les efforts de préparation et de recherche effectuées au préalable, si
approfondis soient-ils. En combat une « préparation bâclée » équivaut à un « désastre » ; pour ne pas arriver à de
tels extrêmes, nous devrions constamment analyser nos actes et faire montre de beaucoup de circonspection en
matière de méthodologie.
. La pratique du karaté ne saurait se cantonner au seul dojo. L'objectif du karaté est de polir et nourrir à la fois le
corps et l'esprit, s'il commence au dojo au cours de la pratique, ce travail ne doit pas s'interrompre en fin
d'entraînement. Il faut pratiquer continuellement dans tous les actes de la vie quotidienne. Une alimentation
déséquilibrée, un abus de boisson, des habitudes nuisibles à la santé en général auront des répercussions certaines
sur la pratique au dojo. Ils fatigueront à la fois le corps et l'esprit et détourneront l'adepte du dessein ultime de la
pratique.
Le karaté est la quête d'une vie entière. La Voie du karaté est sans fin, c'est la raison pour laquelle un pratiquant
sincère pratiquera jusqu'à son dernier souffle. Dans Hagakure, le seigneur Yagyu déclarait qu'il ne savait pas
comment défaire les autres mais qu'il savait comment l'emporter sur lui-même : être meilleur aujourd'hui qu'hier et
meilleur demain qu'aujourd'hui. C'est-à-dire, travailler sans relâche et jusqu'au dernier souf fle pour sans cesse
progresser. La Voie véritable est infinie.
La Voie du karaté se retrouve en toute chose, et c'est là le secret de sa beauté intrinsèque. Un coup, de poing ou de
pied, asséné ou encaissé, peut signifier vie ou mort. Telle est la doctrine au cœur du karaté-dô. Si chaque domaine
de la vie est abordé avec un tel sérieux, épreuves et difficultés peuvent être dépassées. Si un pratiquant affronte
chaque difficulté en ayant le sentiment que sa vie entière est en jeu, il réalisera l'étendue de ses propres ressources.
. Pareil à l'eau en ébullition, le karaté perd son ardeur s'il n'est pas entretenu par une flamme. Un proverbe japonais
illustre cela : « L'apprentissage par la pratique revient à pousser une charrette vers le sommet d'une colline. Cessez
de pousser et tous vos eforts auront été vains. » L'intégration d'une facette du karaté parmi d'autres, ou une
pratique distendue, ne sauraient suffire. Seule une pratique régulière et assidue récompensera votre corps et esprit
des fruits de la Voie.
Ne soyez pas obsédé par la victoire ; songez plutôt à ne pas perdre. Savoir uniquement comment décrocher la
victoire sans savoir comment perdre revient à se mettre soi-même en situation de défaite, ultimes paroles du shogun
Tokugawa[Lequel ?]. L'attitude mentale obsédée par la victoire nourrit nécessairement un optimiste excessif qui, à
son tour, nourrit impatience et irritabilité. L'attitude la plus fine consiste, au contraire, à se résoudre fermement à ne
pas perdre — quel que soit l'adversaire — en prenant conscience de nos propres forces et en faisant preuve de
conviction inébranlable, le tout en adoptant une attitude conciliante dans la mesure du possible.
Ajustez votre position en fonction de l'adversaire.
L'issue d'un affrontement dépend de votre manière à gérer les pleins et les vides (forces et faiblesses). Les
préceptes treize et quatorze évoquent l'attitude mentale à suivre en combat. Un combattant doit pouvoir et savoir
s'adapter à son adversaire ; comme l'eau qui s'écoule naturellement du haut vers le bas, le combattant évite les
points forts de l'ennemi pour le frapper là où il est vulnérable. Il doit éviter toute action stéréotypée, le maître mot de
sa conduite doit être fluidité, souplesse, adaptation, plutôt qu'inertie et constance.
Considérez les mains et les pieds de l'adversaire comme des lames tranchantes. Un pratiquant sincère de karaté-dô
saura rendre ces extrémités corporelles aussi dangereuses que des armes blanches. Dans cette optique, même les
mains et les pieds d'un non-pratiquant peuvent s'avérer dangereux. Un néophyte qui s'implique corps et âme dans
une lutte pour la vie, sans craindre ni blessure, ni trépas peut libérer une puissance considérable et extraordinaire, et
être capable de défaire n'importe quel opposant. Que l'adversaire soit ou non initié aux arts martiaux ne doit en
aucun cas nous leurrer sur son potentiel.
Faites un pas hors de chez vous et ce sont un million d'ennemis qui vous guettent.
Le kamae, ou posture d'attente, est destiné aux débutants ; avec l'expérience, on adopte le shizentai (posture
naturelle).
. Recherchez la perfection en kata, le combat réel est une autre af faire. Les katas sont la moelle de l'entraînement du
karaté-dô, il convient de ne pas les dénaturer et de s'y entraîner conformément à l'enseignement dispensé par le
maître. Anko Itosu disait : « Respectez la forme des katas, ne cherchez pas à en travailler l'esthétique ». En combat
réel, il ne faut pas s'embarrasser ou se laisser entraver par les rituels propres aux katas, le pratiquant doit dépasser
le cadre imposé par ces formes et se déplacer librement en fonction des forces et faiblesses de l'adversaire.
Sachez distinguer le dur du mou, la contraction de l'extension du corps et sachez moduler la rapidité d'exécution de
vos techniques. Les combinaisons citées dans ce précepte s'appliquent aussi bien en kata qu'en combat réel. Si l'on
exécute les katas sans combiner la possibilité de moduler l'intensité et le rythme des techniques ou l'alternance
extension/contraction, l'exercice perd toute sa valeur. L'alternance dur-mou, extension-contraction, lenteur-célérité,
inspiration-expiration est de première importance en combat et peut déterminer l'issue d'un af frontement.
Vous qui arpentez la Voie, ne laissez jamais votre esprit s'égarer, soyez assidu et habile. Que l'on adopte un point
de vue spirituel ou technique, le pratiquant ne doit jamais laisser son esprit « s'égarer » et doit être « assidu et
habile ».
De nombreux maîtres ont illustré ce précepte :
« Dès lors, je pratiquai matin et soir avec ferveur afin d’assimiler les principes de la Voie des arts martiaux au plus
profond de mon être jusqu’à parvenir, aux alentours de ma cinquantième année, à une compréhension naturelle de
ladite Voie. »
— Miyamoto Musashi
« Un merveilleux enseignement vient juste de se révéler à moi. »
— Yamaoka Tesshu, fondateur de l’école d’escrime Mutô-ryû, âgé alors de quarante-cinq ans.
« Je commence enfin à comprendre ce qu’est le blocage au visage (jodan age uke). »
— O’Sensei Funakoshi, alors âgé de quatre-vingts ans.
C’est seulement au terme d’une pratique embrassant plusieurs décennies et entretenue par un esprit courageux et intrépide que l’on
peut parvenir à assimiler, pour la première fois de son existence, les véritables principes régissant la Voie. Cela met en relief la vanité
qu’il y a à croire que l’on pourra devenir maître d’un art martial après 5 ou 10 années de pratique-loisir. Pareilles superstitions leurrent
le pratiquant et salissent la Voie. Vanité et fainéantise sont des chaînes qui entravent la progression, les pratiquants devraient se livrer
à une autocritique de tous les instants et se faire sans cesse violence; jamais ils ne doivent manquer d’être constant jusqu’à avoir un
aperçu clair des strates les plus profondes du karaté-dô. Tous ceux qui ont pour ambition de cheminer sur la Voie devraient faire leurs
ces principes.